Les voies romaines en Ille-et-Vilaine
2-K
Voie de Rieux (DURETIA) à Corseul (FANUM MARTIS)
Le Chemin des Moines.
Le chemin de Corseul.
Cette voie n'est indiquée dans aucun document ancien mais son existence, sans être avérée, est très probable car elle faisait communiquer les deux mers de l'Armorique. Gaultier du Mottay, Alfred Ramé au XIXème siècle et de nos jours, J. P. Pincemin, ont étudié son parcours (1).
Les principaux repères sur son tracé sont les actuelles villes de Sixt-sur-Aff, Guer, Paimpont, Gaël et Saint-Méen-le-Grand. Elle fut connue longtemps sous le nom de Route des Abbayes ou Chemin des Moines parce que joignant les abbayes de Redon, de Paimpont et de Saint-Méen. Cette voie servit également au transport du bois pour la construction navale, depuis la forêt de Paimpont en direction d'Alet.
Elle suivait, semble-t-il, le même parcours que la voie 1-K, de Rieux à Rennes, depuis la Chaussée d'Aucfer en Redon, jusqu'à la Chapelle-Saint-Marcellin, en Bains-sur-Oust.
la chapelle Saint Marcellin
La chapelle, bâtie sur les fondations d'un édifice religieux du IXème siècle (2), marque l'emplacement exact de l'intersection des deux voies. Celle se dirigeant vers Corseul prenait ensuite la direction de Sixt-sur-Aff (3). De Sixt, elle pouvait gagner Guer et Saint-Malo-de-Beignon, dans le Morbihan, puis entrer de nouveau en Ille-et-Vilaine, soit par le sud de Concoret, soit au sud du château de Comper, au niveau du village de Saint-Marc (4).
On peut encore nettement suivre son tracé, plus vers le nord, sous la forme d'un chemin rural qui marque les limites des communes pendant plus de neuf kilomètres.
l'abbaye et l'étang de Paimpont
En suivant les hauteurs, elle traversait la forêt de Gaël Paimpont (5), puis elle passait ensuite à la Grohandais et au Tremblay. Au lieu-dit Limpret, elle coupait la route de Gaël à Saint-Malon-sur-Mel, passait au Longrais et, 100 m plus au nord, traversait le Meu à gué. Elle continuait par la Ville-ès-Borgnes, coupait la D30, deux kilomètres à l'est de Gaël et se continuait, quatre kilomètres encore, jusqu'à Saint-Méen-le-Grand.
la voie de la forêt de Paimpont à Gaël
la voie de Gaël à Saint-Méen
Tout au long comme limite de communes, voici son tracé détaillé après sa traversée de la D3O de Gaël à Muel, tantôt chemin de terre, tantôt goudronné. On la voit à la Ville-Beslé, elle disparaît ensuite pendant 300 m, réapparaît sur 300 m, croise un autre chemin vicinal et continue vers le nord, tantôt comme chemin rural, tantôt comme bord de champs, jusqu'à ce qu'elle arrive au lieu-dit le Betton. Elle traverse alors un petit bois où son tracé a été fossilisé pendant quelques centaines de mètres. Le chemin actuel ne mesure plus que trois mètres de largeur mais de chaque côté du bombé, les fossés anciens montrent la largeur d'origine de la voie.
A 200 m à l'est de la Ville-ès-Vieux (6), toujours bien visible dans le paysage, elle coupe un autre chemin communal avant de prendre la direction des Gravelles. C'est dans ces environs qu'elle pourrait avoir rencontré une autre voie, peut-être celle de Rennes à Carhaix.
Les quelques vues suivantes nous permettent de suivre pendant huit kilomètres, celui que l'on nomme sur les anciens cadastres "le Chemin de Paimpont" , devenant tour à tour route ou chemin, depuis le Tremblay jusqu'aux Gravelles.
le tracé de la voie entre la Grohandais et le Tremblay
la voie au nord du Tremblay
la voie au sud du Limpret
au nord du Limpret
au sud de la Longrais
nord de la Longrais
sud la Ville-ès-Borgnes, chemin creux descendant vers le Meu
gué sur le Meu
au sud du lieu-dit Betton
chemin d'accès à le ferme du Betton
bosquet au nord du Betton
Est de la Ville-ès-Vieux
Sud des Hautes-Gravelles
en direction des Hautes Gravelles
Sur les dernières vues, on aperçoit l'emprise totale de la voie, entre ses fossés. Nous noterons dans la toponymie voisine des noms caractéristiques du passage d'un chemin ancien : à l'est la Millière, à l'ouest Mi-Voie, la Lande de Mi-Voie et le Bourg-Neuf. A ce dernier endroit, la direction générale de notre chemin indique Saint-Méen-le-Grand, où la voie aurait pu faire sa jonction avec la voie de Vannes à Corseul (voie 2-L).
Cette situation au carrefour de deux voies joua certainement un grand rôle dans le développement de la ville de Saint-Méen : une première abbatiale dédiée au saint est bâtie en 1094, sur les ruines d'un autre édifice du VIIème siècle dont le monastère bénédictin va remplacer celui de Gaël, détruit lors des invasions. Très vite, sa situation sur la route fera de Saint-Méen un lieu de pèlerinage important. Partout à l'entour se construisent des congrégations, hôpitaux, auberges et hôtelleries, ainsi qu'une grande bibliothèque qui va devenir le centre de rayonnement culturel de la région (7).
La voie semblerait ensuite être passée à l'est de Saint-Méen par la Lande Borgnet près de la Chapelle Saint Méen. Il est possible qu'elle ait suivi le tracé de l'actuelle D 166. Plus au nord, sur le cadastre de Saint-Jouan-de-l'Isle, le "Vieux Grand Chemin" entre dans le département des Côtes-d'Armor au Pont Rimbert, ancien gué puis pont où elle traverse la Rance, prenant ensuite la direction de Corseul, le Fanum Martis des Coriosolites.
NOTES SUR LA VOIE.
Du sud au nord, elle croise Rennes Vannes (voie 1-L), Rennes Quimper (voie 1-M), Rennes Carhaix (voie 1-N) et fusionne sans doute avec Vannes Corseul (voie 2-L).
Sur le territoire de la commune de Gaël, dont le nom de Wadel, viendrait du gué sur la voie de Rennes à Carhaix, des fouilles archéologiques ont mis à jour des objets et pièces de monnaie, le long de l'ancienne voie des moines, séparant la commune de celles de Saint-Onen-la-Chapelle et de Muel, et appelée Chemin de Paimpont ou Chemin des Moines. Gaël aurait été la capitale de l'ancien royaume de Domnonée, fief du roi Judicaël. Une partie du mur de l'ancien château subsista longtemps au bord du parking de l'école.
La voie a été repérée aux environs de Caulnes, dans le département des Côtes-d'Armor. Elle était connue sous le nom de Chemin de Corseul. Vers 1860, lors de la construction de la voie ferrée, de nombreux objets gallo-romains ont été exhumés : restes de thermes, de sculptures, poteries et monnaies.
RENVOIS
(1) Recherche sur les voies romaines des Côtes-du-Nord - Gaultier du Mottay. 1867 - J.P. Pincemin - dossiers du CERAA n°13 -1982
(2) Saint Conwoion, fondateur de l'abbaye de Redon, rapporta de Rome les reliques de saint Marcellin. Nominoë, roi de Bretagne vint à sa rencontre par le tracé de la voie romaine. Il fit élever une chapelle au lieu de la rencontre, le village de Saint-Marcellin.
(3) L'origine du nom de Sixt évoquerait la sixième borne milliaire sur la voie.
(4) Saint-Marc, christianisation d'un édifice religieux dédié au dieu Mars.
(5) Une tradition veut qu'une voie soit passée au Pont du Secret, à Paimpont.
(6) les lieux-dits la Ville-ès-Vieux et la Ville-ès-Pieux, juste à côté du précédent, sont des déformations de la Ville-ès-Rieux, ce qui indique bien l'origine de la voie romaine : la cité romaine de Rieux (Duretia).
Un kilomètre à l'ouest de Saint-Onen, se trouve également le Bois-Rieux, ainsi qu'un autre Bois-Rieux entre Saint-Méen et le Crouais, et une Ville-ès-Rieux, près de Quédillac, sur la même voie. Côtes-d'Armor, une Ville-ès-Rieux 1 km sud-est Saint-Jouan-de-l'Isle
(7) abbaye de saint-Méen, voir voie 3-R.
NOTES :
L'ancienne voie romaine continua d'être utilisée durant le moyen âge. Sur son parcours, furent édifiées plusieurs abbayes, lieux de pèlerinages, qui lui donnèrent son nom de Chemin des Moines. Ainsi, du sud au nord, presqu'en droite ligne, l'abbaye de Saint-Gildas-des-Bois, près de Rieux, celles de Redon, Paimpont, puis Saint-Jean de Gaël, devenue abbaye de Saint-Méen, en Ille-et-Vilaine et, plus vers le nord, les abbayes de Notre-Dame de Beaulieu à Languédias, Saint-Magloire à Lehon près Dinan, Trégouët à Corseul et enfin celle de Saint-Jacut sur les côtes de la Manche, dont l'abbatiale a aujourd'hui totalement disparu.
abbaye bénédictine Saint-Gildas
abbaye bénédictine Saint-Sauveur de Redon
abbaye de Paimpont
abbaye de Saint-Méen
abbaye Notre Dame de Beaulieu, Languedias
abbaye Saint-Magloire, Lehon
abbaye de Trégouët, Corseul
abbaye disparue de Saint-Jacut-de-la-Mer - plan de 1690
.